Gary Kurtz

DOSSIER DE PRESSE

Aux confluents du mystique et de l’illusion

Cindy Lévesque

Gary Kurtz cultive l’ambiguïté. Préférant troubler ses spectateurs à confondre les sceptiques, il promène son étrange spectacle dans le but avoué de faire « rêver pendant deux heures » son public. Le Montréalais d’adoption joue à la chaise musicale, valsant entre l’illusionnisme et le mystique, le divertissement et la réflexion, entre le Québec et l’Europe qu’il a maintenant conquise.

Rien de plus complexe, alors, que d’essayer de cerner ce que dépeint concrètement le nommentalisme, une branche de l’illusionnisme qu’il pratique depuis plusieurs années. « Pour moi, ce sont des jeux d’esprit », illustre Gary Kurtz, avant de comparer ses performances au domaine plus connu de la magie traditionnelle. Avec ses tours de passe-passe, la magie commande son lot d’outils de travail, ce que le mentaliste n’hésite pas à déplorer : « Les accessoires posent une barrière entre le public et moi ». Ainsi, il ne traîne en tournée « qu’une serviette » remplie de blocs-notes, de livres et de crayons. Sa présence et ses capacités (mélange d’intuition et de psychologie, selon lui) suffisent pour mystifier son auditoire. Il ne se voit donc pas obligé de rivaliser « avec les 18 camions de David Copperfield ». Il devine le nom de votre premier petit ami, récite le numéro de série de billet de spectacle, épelle les premiers mots du livre que vous avez entre les mains. Le mentalisme à la sauce de Gary Kurtz ressemble, pour autant qu’il se définisse, à l’homme lui-même : artistique et sans prétention. Il est, en fait, complètement inclassable.

« Je suis un artiste polyvalent, mais complet », clame-t-il. Une juste description pour un homme qui se réclame du domaine artistique, donnant pour preuve son passage dans le monde élitiste de la danse contemporaine, qu’il a par la suite délaissé. « Mon corps était crevé et j’étais tanné d’être pauvre », lance-t-il mi-sérieux, mi-coquin. Le domaine corporatif lui a ensuite permis d’exercer la magie traditionnelle (où son nom est synonyme de succès), à travers laquelle il a beaucoup appris. « Pour moi, c’était une façon d’apprendre à présenter les choses. Mais ce qui m’a toujours fasciné dans la compréhension de la magie, c’est la psychologie, ce qu’il y a derrière ». Ce qu’il met en pratique, donc.

Vrai qu’il est sympathique, Gary Kurtz. Il avoue d’ailleurs avoir travaillé le côté charismatique de sa performance, tout comme l’aspect théâtral du spectacle. Pourtant, là ne réside pas l’unique cause de sa réussite. « J’ai eu mon succès non pas à cause de l’ambition, mais plutôt à cause de mon manque d’ambition. Je veux simplement faire ce que je fais du mieux que je peux », souligne-t-il. Une recette simple agrémentée de suppléments efficaces : l’interaction avec le public amène invariablement une bonne dose d’improvisation. « Un humoriste qui présente le même spectacle tous les soirs avec les mêmes blagues placées de la même façon...je ne sais pas si je serais capable », lance-t-il avant de préciser que ses prestations réservent toujours quelques surprises : « On ne sait jamais ce qui va arriver. C’est la grande force mais aussi la grande faiblesse du spectacle. »

Malgré la préparation et la pratique, on découvre vite dans les propos de Gary Kurtz que le mentalisme n’est pas une science exacte. « Je me plante avec plusieurs choses tous les soirs parce que j’ai fait un mauvais choix de personnes ou parce que quelqu’un se fige sur scène de sorte que je ne peux plus lire son langage corporel. Mais, ma plus grande force, c’est de mettre les gens à l’aise : je les fais monter sur scène et, tout d’un coup, ils sont dans leur salon avec des amis. »

Et ça fonctionne. Après de belles années dans le monde de la danse (« à danser devant d’autres artistes ») et 12 ans à pratiquer magie puis mentalisme pour le domaine corporatif (« inconnu » et « bien payé »), Gary Kurtz rencontre à 42 ans la célébrité, tant ici que sur le continent voisin. « Le public français prétend être beaucoup plus cartésien. J’ai trouvé que ce n’était pas du tout le cas », précisera-t-il. Autant là-bas que sur les planches québécoises, le mentaliste n’a aucune difficulté à faire monter des volontaires sur scène pour « s’amuser ». « Les gens se posent toujours des questions : Mais comment il fait ?. Ça me fatigue », maintient l’artiste. Difficile pourtant de ne pas s’interroger sur les techniques de « lecture de pensées » de Gary Kurtz. « Tous mes trucs, toutes mes techniques sont psychologiques ou mentales, avec le langage, les mots. Les spectateurs ne vont pas trouver de double-fond dans la boîte. » Ce n’est pas faute d’avoir essayé. En France, les participants sont invités à manipuler les quelques accessoires de la scène et, jusqu’à maintenant, peu ont déniché de supercherie. On a plutôt tendance à crier au génie...même si les esprits raisonnés voudraient bien trouver le fondement du phénomène. « Je sais qu’il doit y avoir une explication à ce que je fais, mais je ne l’ai pas trouvée ! », réplique le principal intéressé.

En attendant l’illumination, Gary Kurtz promène son équipe entre le Québec et l’Europe, où il entreprendra, à l’automne, une tournée de 45 villes en Suisse, en Belgique et en France. Pour l’instant, « la francophonie est bien assez grande pou nous », constate-t-il. Il compte en effet sur une solide réputation outremer, entre autres en raison d’un article élogieux dans Le Monde et d’une l’émission de Laurent Boyer sur la chaîne M6 (diffusée récemment à TVA) qui l’ont fait connaître du grand public. Aux différents groupes de sceptiques qui n’ont pas manqué de se manifester, il réplique : « Un sceptique, c’est quelqu’un qui veut avoir la preuve, mais qui reste ouvert. Souvent les groupes qui se disent sceptiques ne sont en réalité pas ouverts aux expériences nouvelles. »

Gary Kurtz lui-même ne ferme pas la porte à d’éventuelles ouvertures, se prenant à rêver de comédie et, peut-être, d’un retour à la danse. Parlant d’un roman en processus d’écriture, il confie : « Maintenant, en faisant un spectacle populaire, il y a toujours des choses vachement pas populaires qui viennent à mon esprit. J’aimerais un jour retourner à la danse, à la chorégraphie, pour exprimer des choses plus noires. » L’art (théâtre, danse, écriture, comédie) reste ainsi la porte de sortie la plus sûre pour cet Ontarien, anglophone d’origine, qui a choisi Montréal comme terre d’accueil pour « la liberté et l’attachement à la culture européenne » qu’on y prône, et ce, malgré une langue française qu’il ne maîtrise pas encore parfaitement. Pour un homme « né à la mauvaise place et à la mauvaise époque », Gary Kurtz semble avoir trouvé son propre créneau à cheval sur deux continents.

Gary Kurtz
18, 19, 20, 25, 26, et 27 juillet
À 20h30.
Chapiteau Saint-Sauveur
Renseignement : 450-227-1616 ou 1-877-227-1616
http://www.chapiteaux.ca